Le « simp », cet homme prêt à tout pour voir une fille changer de maillot de bain


En live sur Twitch, la streameuse DoubleDDarcee, 34 000 abonnés, encourage ces derniers à sortir le portefeuille pour qu’elle réalise des « défis », inscrits en bas à gauche de l’écran. Capture d’écran du live du 19 juin 23.

Depuis 2019, la plate-forme Twitch, consacrée aux jeux vidéo, propose une nouvelle fonctionnalité « Just Chatting », qui permet de simplement discuter, dans laquelle on trouve une thématique prisée : « piscines, jacuzzi et plage ». C’est dans cette vitrine virtuelle qu’officie DoubleDDarcee. Ses streams mêlent échanges écrits et poses aguichantes face caméra. Pour que la demoiselle aille troquer son bikini échancré blanc contre un bikini échancré rose, il faudra encore quelques abonnements payants (« subs » dans le jargon), souscrits par des anonymes dans le live de la streameuse.

Comme elle, des femmes en maillot de bain s’ébrouant au milieu d’une eau qui glougloute, parfois assises sur une bouée banane (oui, la symbolique ne fait pas dans la dentelle), font turbiner cette sous-culture Internet qui hésite entre le peep-show 2.0 et le calendrier Sports Illustrated animé. Communiquant par tchat avec leurs nombreux spectateurs et adoptant des positions parfois très suggestives devant leur live cam, ces entrepreneuses émoustillent un public pantois de gars prêts à faire chauffer leur carte bancaire pour une once d’attention en retour : les « simps ». Un clin d’œil, un petit mot sur le tchat, son nom écrit quelque part : il n’en faut pas plus au simp pour se sentir soudain exister.

A l’origine, cette insulte – puisque c’en est une – popularisée par les rappeurs dans les années 1980, vient de l’anglais simpleton (« benêt », en français). Elle est ensuite reprise par les masculinistes MGTOW (Men Going Their Own Way, « les hommes qui suivent leur propre chemin »). Haïssant la gent féminine, qu’ils trouvent abjecte, ils détestent tout autant les simps, qu’ils voient comme des groupies haletantes. Des mecs si faibles qu’ils feraient passer la quête d’attention féminine avant la franche camaraderie masculine. Dans les commentaires et sur les réseaux sociaux, le terme est donc souvent employé de manière moqueuse, voire dégradante, servant parfois à des campagnes de harcèlement. Il n’est pas simple d’être un simp. Tant et si bien que, fin 2020, Twitch annonce bannir le terme de son tchat.

Marchandisation banalisée

Le problème du simp, c’est qu’il est coincé entre un masculinisme toxique qui veut lui faire la peau et une marchandisation banalisée du corps de la femme. Forte de ses 6,4 millions d’abonnés sur Twitch, la Texane Amouranth (Kaitlyn Siragusa de son vrai nom), 29 ans, est l’une des stars de la plate-forme. Cette rousse pulpeuse à la peau laiteuse a bien compris comment se servir de ce site comme hameçon, pour ensuite rabattre ses adorateurs vers son compte OnlyFans où, sur abonnement, elle publie du contenu « très exclusif ». Comprendre : pornographique. Là encore, le simp n’hésite pas à sortir le portefeuille pour se faire croire qu’il noue une relation personnelle avec son idole. Ainsi, quand la jeune femme inscrit au marqueur le pseudo de l’abonné fanatique sur sa poitrine, ses bras ou ses cuisses, le simp éclate de joie, comme s’il avait atteint l’épiphanie. Ça y est, la callipyge lui appartient, se dit-il.

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